A la Sorbonne, le Président de la République a prononcé son discours sur l’Europe

A la Sorbonne, le Président de la République a prononcé son discours sur l’Europe

Source : AFP

Le jeudi 25 avril 2024, le Président de la République a prononcé le « discours de la Sorbonne II ». Il avait donné rendez-vous il y a sept ans à la Sorbonne, il a tenu sa promesse. Ce discours, celui d’un chef d’Etat, engage la France qui, par ses propositions, veut peser sur les 5 prochaines années en Europe.

Endettement commun, défense européenne, climat, régulation des acteurs du numérique, nouvelle politique industrielle : ce qui semblait impensable hier est entrée dans les faits. Sans l’Europe, la France risque l’effacement. Qui peut penser que nous pouvons faire seuls face aux Etats-Unis, à la Chine ? Qui peut penser que c’est à l’échelle nationale que l’on peut traiter le problème climatique, faire émerger des champions dans les secteurs de demain (IA, hydrogène), nous protéger face au retour de la guerre et aux tensions géopolitiques ? Nous sommes européens de cœur et européens par nécessité, parce que sans Europe, ni puissance, ni prospérité, ni capacité à défendre nos valeurs.

Le premier discours de la Sorbonne fixait l’objectif d’une Europe plus unie, plus souveraine, plus démocratique. Si sur les deux premiers points, le chemin parcouru est immense, nous n’avons pas suffisamment progressé sur le dernier.

En sept ans, l’Europe s’est profondément transformée au gré de crises historiques : le Brexit, la pandémie mondiale, le retour de la guerre et l’accélération des transitions numériques et climatiques. Toutes ces crises ont dévoilé nos dépendances et ont accrédité l’ambition d’une Europe plus souveraine. L’Europe a opéré des transformations majeures : l’unité financière pour sortir par le haut de la pandémie ; l’unité stratégique sur de nouveaux domaines nécessaires à la protection de nos concitoyens, la santé, l’énergie, la défense ; les fondations d’une souveraineté technologique et industrielle cristallisée par l’agenda de Versailles, la capacité à penser, préparer, planifier la transition écologique et numérique, la faculté à repenser nos frontières avec le pacte asile et immigrations et l’inscription de l’Europe dans son voisinage et au-delà de l’Union.

Pour autant, l’Europe affronte un triple défi sur chacun des trois piliers de sa promesse : la sécurité avec le durcissement des relations internationales ; la prospérité, quand elle est menacée de décrochage industriel et technologique qui met en péril le financement de notre modèle social ; la liberté avec une remise en cause de son modèle démocrate, humaniste et libéral.

« Nous devons être lucides sur le fait que notre Europe, aujourd’hui, est mortelle. Elle peut mourir. Elle peut mourir, et cela dépend uniquement de nos choix. »

L’enjeu est donc une accélération vers la puissance qui se déploie sur trois axes.

1. Bâtir une Europe puissance
Au-delà de la mise en échec de la Russie, cette Europe doit nouer des alliances avec des partenariats solides et complets pour jouer son rôle de puissance d’équilibre, défendre son territoire, de manière complémentaire avec l’OTANT en engageant la réflexion sur le rôle de la dissuasion française. Cette défense suppose le renforcement de l’intimité stratégique (2e acte de l’initiative européenne d’intervention et création d’une Académie européenne) et la création d’une force de réaction rapide. Cette crédibilité stratégique s’appuiera sur un Conseil de défense européen. Elle nécessite la constitution d’une industrie de défense avec une préférence européenne. Protéger nos frontières signifie aussi mettre en œuvre une politique plus ferme de retours et de réadmissions et lutter contre les réseaux criminels.

2. Bâtir une Europe de prospérité
A partir du constat de l’obsolescence des règles de la mondialisation libérale, l’idée force est de :
a. Produire plus et mieux : c’est-à-dire de manière décarbonée dans le sillage de l’agenda de Versailles et donc en bâtissant une Europe puissance électrique comme nouvelle liberté du marché intérieur et une reprise d’un objectif d’une Europe de l’atome – pas de remise en cause du Green Deal mais au contraire une cible européenne de sortie des énergies fossiles. Simplifier drastiquement et intégrer le marché unique (rapport Letta). Une nouvelle politique industrielle avec l’accent mis sur 5 secteurs stratégiques (hydrogène, espace, biotechnologies, IA). Une politique commerciale alignée avec les instruments de réciprocité. Une politique d’innovation via un effort massif pour la recherche : objectif de 3%, programmes européens contre les grandes maladies du siècle.
b. L’Europe doit jouer sur trois leviers : les normes, le commerce et l’investissement. Par un doublement de la capacité d’action financière de l’UE, adossée à de nouvelles ressources propres par une union de l’épargne et de l’investissement privés.

3. Bâtir une Europe humaniste
a. L’Europe doit défendre son modèle politique de démocratie libérale. Par une vigilance accrue contre les ingérences et les atteintes à l’Etat de droit (conditionnalité renforcée des aides). Par une réponse démocratique aux colères des peuples : chantier institutionnel visant à ouvrir l’UE à ses citoyens (consultation et initiative citoyenne).
b. L’Europe doit défendre sa conception de la liberté par le savoir, la culture et la science. Par une défense de son humanisme européen contre les obscurantismes : c’est la promotion de l’Europe des universités (doublement des alliances d’universités, Erasmus de l’apprentissage, Europe des trains, alliances des bibliothèques et musées). Par la défense de son imaginaire et de son universel contre les « ingénieurs du chaos » : régulation du numérique et protection des enfants, dimension européenne du Pass  culture, Arte comme plateforme européenne.
c. L’Europe doit défendre sa conception de l’égalité. L’égalité entre les femmes et les hommes (inscription de l’IGVF dans la Charte des droits fondamentaux de l’UE). L’égalité sociale avec un nouveau « Pacte européen des solidarités ».
d. Par une politique de préservation de la nature.

En conclusion, le Président de la République a rappelé que le risque qui pèse sur l’Europe c’est l’effacement. En raison de sa minorité géopolitique et de son décrochage économique. En raison aussi de la haine de soi européenne. Si 2017-2024 a représenté l’ère de la fin de la naïveté, et l’entrée dans l’âge de la souveraineté, 2024-2031 doit être celui de la fierté européenne. Fierté pour notre Histoire et notre modèle, fierté et force dans l’affirmation d’elle-même à l’avant-garde industrielle et technologique comme sur la scène du monde.

Sandra Marsaud

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